Le 6 octobre 2011, parution aux Éditions Pocket, dans la collection Terre Humaine, des carnets d'Édouard Coeurdevey, sous le titre "Carnets de guerre 1914-1918, un témoin lucide".

Le 2 décembre 2010 : Dépôt des carnets d'Édouard Coeurdevey à la Bibliothèque Nationale de France, archives Plon- Collection "Terre humaine".

Le 28 septembre 2009 : ajout d'une partie de la correspondance quotidienne et familiale de Louis Coeurdevey, frère d'Édouard, tenue de janvier 1917 à mars 1919.

230 lettres constituant une vision de la guerre, parallèle, bien différente de celle politique et littéraire qui ressort des quatorze carnets d'Édouard. Celle d'une armée paysanne aspirée par la  guerre et qui se prépare, résignée, à y disparaître.

Le 18 septembre 2008, parus dans la collection Terre Humaine, Éditions Plon,  les carnets d'Édouard Coeurdevey, sous le titre "Carnets de guerre 1914-1918, un témoin lucide". Préface de Jacques Marseille.

Conventions de lecture:

Les dates sont inscrites en italique, chaque début de mois cité est en italique centré.

Les passages à la ligne du texte respectent ceux du texte manuscrit.

Les mots suivis d'un astérisque rouge sont augmentés au survol par la souris de celui-ci d'une notice historique, géographique ou autre.

Les lieux suivis d'un astérisque gris  amènent d'un click de souris sur celui-ci à un positionnement géographique).

Les traductions de l'allemand vers le français, du latin vers le français, de mots, de phrases ou de paragraphes sont inscrites en italique entre parenthèses.

Les mots suivis  de (?) ou les groupes de mots suivis de (...?...) sont l'objet d'un doute relatif à leur transcription ou à leur cohérence.

Les mots illisibles dans le manuscrit sont remplacés par la mention (illisible).

Les groupes de mots ou les phrases illisibles dans le manuscrit sont remplacés par la mention (...illisible...)

Les éléments relatifs aux notes techniques, aux notes de service ou administratives, les éléments détachés ou volants des carnets sont regroupés en fin de chaque carnet, en attente de tri.

Abréviations

Ont été respectées lors de la saisie la ponctuation, intuitive ou non-conventionnelle et  l'orthographe du patois et de l'argot.

 

          Mais pour qui donc Édouard a-t-il rédigé ces milliers de lignes ? Pour qui donc furent écrits ces milliers de carnets que des milliers de soldats griffonnèrent, perdus au milieu des sombres fumées de la catastrophe ?

          Mille pages manuscrites noircies d'ennui, de peur, de désillusion, d'exaltation. Pas pour la transmission aux siens, à qui il tut toujours ou longtemps l'existence de ces mots douloureux. Pas pour l'exorcisation du chaos mondial qui s'abattait sur lui, si petit au monde. Pas pour la catharsis d'une écriture qui devait lui être plus naturelle que la parole.

          Je ne sais pas.

          Alors, près d'une centaine d'années plus tard, l'objet de cette transcription aura été de traduire le cri ou le silence de ses mots en une mémoire vivante, de réveiller ces faits et pensées du profond sommeil des millions d'hommes que cette guerre endormit trop tôt, avant qu'ils aient pu trouver, eux, un moyen de me transmettre leurs sourires et leurs rêves, à moi, si petit au monde...

Rémy Cœurdevey, son petit-fils. Le 20 février 2005.

          Édouard, qui a rédigé ces quatorze carnets à partir de 1914 n'est plus un jeune homme. A trente-deux ans il a pourtant le sentiment de n'avoir pu encore réussir à réaliser deux de ses ambitions les plus fortes : une situation d'intellectuel écouté, une vie sentimentale libre et apaisée. Sur ces deux axes, la guerre ne lui apporte ni pause ni répit.

          Par contre, il se sent sûr de lui dans deux domaines : ses racines paysannes et chrétiennes, la fraternité d'une grande amitié. Le premier sera une constante de toute sa vie; le second va être tragiquement brisé par l'hécatombe de 1914 qui lui enlève l'amitié de son plus grand ami, Maurice Colin.

          Par quel miracle les quatre frères mobilisés de la famille Cœurdevey reviendront-ils tous vivants de la grande boucherie ?

 

 

Édouard est l'aîné d'une famille rurale de sept enfants.

        Son frère Louis qui vient en n°3, né en 1885, réchappera de peu aux fièvres dévastatrices du front d'Orient. (Son propre carnet de guerre est consultable ici ainsi qu'une importante partie de sa correspondance familiale).

          L'autre frère, Julien, le n°5, né en 1891 sera gravement blessé sur le front de l'Aisne en 1915, perdant un œil.

          Enfin, le cadet, Henri, né en 1895 sera réformé du fait de sa vue fortement déficiente. Édouard lui-même sera blessé à la cuisse à la mi-août 1918. On rencontrera cette fratrie tout au long de ces carnets. 

 

           Ses trois sœurs, Augusta, Berthe et Madeleine, nées entre 1883 et 1898 sont pratiquement absentes de toute référence dans ces quatorze carnets.

 

           Ce ne sera pas en tout cas dans ces écrits la situation de la mère, Félicie, née Laurent en 1858, terrible mère de cette famille nombreuse et qui exigera de ses enfants éloignés durant la guerre et au delà, une lettre hebdomadaire jusqu'à la fin de sa vie. Le père, Claude Cœurdevey, né en 1854, sera une silhouette forte mais discrète.        

           De cette origine paysanne, située à Verne, sur le plateau de la rive droite du Doubs, à sept kilomètres sur les hauteurs de la petite ville de Baume-les-Dames, il faut savoir que la famille Cœurdevey était l'une des plus pauvres du pays. N'ayant qu'une vache ou deux, l'exploitation agricole était insuffisante pour nourrir une famille de sept enfants. Aussi le père, Claude, complétait ses revenus par une activité de cordonnier. Il était surnommé Quat'sous, nom générique donné à toute la famille, parce qu'il exigeait souvent des enfants passant près de son atelier qu'ils aillent lui chercher pour quatre sous de tabac au bistrot-bureau de tabac du coin.

          Pour diminuer la pression économique de la famille nombreuse, Édouard, l'aîné, à quinze ans, a été placé comme valet de chambre chez le Sénateur Bernard, de Baume-les-Dames, où une de ses tantes, Eulalie était déjà placée, comme bonne à tout faire. C'est là, après le travail, le soir, ou durant les absences du Sénateur qu'Édouard fouille dans sa bibliothèque pour satisfaire une soif inextinguible de savoir. Son ambition : passer le B.E, le Brevet élémentaire, premier titre exigé pour pouvoir enseigner, lui qui n'a que le certificat d'étude, passé brillamment.

          De fait, il obtiendra, à la suite de l'examen réussi, un poste d'instituteur auxiliaire à Germondans, petite localité du Doubs, où sa présence pédagogique sera marquante, déjà. Par la suite, il poursuivra ses études, obtiendra même une licence ès lettres à la faculté de Besançon. Il s'y éprendra (le terme est-il trop fort ?) d'amitié avec Maurice Colin, et à un moindre titre avec son frère Sadi, originaires de Montbéliard, et qui seront tués tous deux à la guerre. Ses Maîtres, Édouard Droz et Albert Mathiez le marqueront puissamment. On en a des échos directs dans ces carnets.

          Ses études d'allemand lui donnent l'occasion de réaliser un stage en Autriche. Doué pour les langues, il s'y trouvera à l'aise. Et c'est là qu'il se laissera enfin aller à l'aventure sentimentale. Il s'éprend d'une jeune Autrichienne, Emmy, transcendant les conflits internationaux qui opposent la France aux Empires germaniques. 1914 survient. La tension est telle qu'il se sent obligé à la rupture. L'attraction physique et sentimentale doit céder devant l'opposition belliqueuse. Situation tragique qui s'ajoute au reste pour définir l'état de guerre. Mais le besoin érotique sera permanent, constamment réfréné par la référence religieuse à la notion de "pureté". Les innombrables "tentations" seront l'occasion de ruminations morales torturantes dont il se sortira par une véritable mystique très inspirée de littérature.

          On ne peut minimiser l'importance de celle-ci. Le texte de ces carnets montre explicitement le soin mis à la rédaction. Les pages ont été manifestement relues avec attention par leur auteur. A la fin même, l'intention de rédiger un carnet spécial de portraits typiques est clairement exprimée, ce qui montre l'ambition littéraire de l'ensemble, s'ajoutant au témoignage et au mémorial.

          Pour prouver l'importance qu'à ses yeux ces carnets revêtaient, il faut savoir qu'en 1939, au moment où Édouard Cœurdevey, devenu directeur de l'École Normale d'Instituteurs Catholique du Bas-Rhin à Obernai, est obligé de quitter l'Alsace, alors "zone de feu", pour Solignac en Haute-Vienne, il emporte dans ses très maigres bagages quelques livres (son "Péguy" complet) et ses carnets de guerre. Tout le reste de ses biens sera dispersé et perdu au cours de l'occupation allemande de 1940 à 1945.

          A sa mort, en 1955, les précieux carnets seront conservés par moi-même et redécouverts en quelque sorte à la fin du siècle.

          C'est grâce à l'énergie, au soin et à l'attention d'un petit-fils qui n'aura pas connu son grand-père, que ce texte est "saisi" sur ordinateur, avant que soit trouvé le lieu définitif où ce précieux trésor pourra être déposé et conservé.

Jean Cœurdevey, son fils.

       

 

Conventions de parcours:

La circulation parmi les treize carnets se fait via les vignettes numérotées en haut de page.

Les photographies en vignettes sont cliquables à leur survol et appellent dans une nouvelle fenêtre l'image en pleine résolution.

Les photographies insérées à l'intérieur du texte sont issues des carnets et identifiées quant à leur sujet ou à leur date. Celles figurant en marge gauche du texte ne sont relatives à aucune citation précise, ou proviennent de sources différentes des carnets.

Les carnets cinq, six, sept, onzeA sont scindés en deux parties, pour des raisons de longueur du texte.

 
   

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